Gachepapier [Season 01, épisode 01]

Traduction

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English transcript

Gachepapier [S01E01]

2019/09/10

On dit que derrière chaque grand homme se cache une grande femme. En ce qui concerne mon invité du jour, ce sont trois petites filles qui se sont un jour cachées derrière lui. Sans elles, il ne serait peut-être pas devenu l'artiste que nous connaissons aujourd'hui. Si vous voulez savoir comment Gachepapier s'est lancé dans l'origami, restez avec moi…

À propos de Gachepapier
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Sources
Retrouvez les liens vers les livres, artistes, expositions, etc. que Gachepapier a évoqués sur page Diigo

La Grande Bibliothèque de l'Origami

One water, one world par les artistes du SAOC, édité par Nicolas Terry. Disponible sur origami-shop.com

L'origami à la conquête du monde

Origami par Alex Cordo

Podcasts

Alice isn't dead par Night Vale Presents

Un épisode et j'arrête par l'ACS

Créateur
Stéphane Gérard
Musique
Slottskogen Disc Golf Club de Wintergatan
Dialogues TV

Steven Universe - S04E03, Buddy's Book

Dead like me - S02E04, The Shallow End

The good place - S03E06, A Fractured Inheritance

Outro
Mon invité spécial…
Durée
38'59''

Traduction

Stéphane

On dit que derrière chaque grand homme se cache une grande femme. En ce qui concerne mon invité du jour, ce sont trois petites filles qui se sont un jour cachées derrière lui. Sans elles, il ne serait peut-être pas devenu l'artiste que nous connaissons aujourd'hui. Si vous voulez savoir comment Gachepapier s'est lancé dans l'origami, restez avec moi

Bienvenue dans Precrease & Collapse.

[Thème]

Slottskogen Disc Golf Club by Wintergatan

Stéphane

Aujourd'hui, j'ai l'honneur de recevoir Gachepapier, un artiste belge vivant en Allemagne. Vous avez certainement déjà vu son travail sur Instagram. Ses portraits sont particulièrement surprenant, tant il arrive à insuffler la vie dans son papier. À mi-chemin entre la sculpture et le pliage, on reconnaît son style immédiatement. Cela représente beaucoup pour moi de m'entretenir aujourd'hui avec lui. Nous nous sommes rencontrés à Lyon il y a quelques années. Depuis, à chaque fois que nous nous y recroisons, j'ai la chance d'admirer son travail et la façon dont il a évolué.

Je vais donc pouvoir comprendre d'où lui vient son inspiration et lui demander ce qu'il pense de l'origami.

Bienvenue Gachepapier, et merci d'avoir accepté mon invitation.

Gachepapier

Merci Stéphane, c'est un grand plaisir pour moi aussi. Je suis honoré d'être ton invité aujourd'hui.

Stéphane

D'après ton blog, tu as commencé l'origami à 34 ans. Est-ce correct ?

Gachepapier

C'est à peu près ça. Ce que j'écris sur mon blog est en général correct !

Stéphane

Super ! Et te souviens-tu dans quel contexte tu as découvert l'origami ?

Gachepapier

La première fois, c'était vraiment un hasard. Nous nous demandions comment occuper nos trois filles. On a pensé à des activités manuelles, et je suis tombé sur un livre d'origami. Je ne savais pas que ça pouvait exister. Je l'ai acheté et c'était parti : ma fille de cinq ans trouvait les modèles très difficiles, et je les ai faits à sa place.

Stéphane

C'était la première fois que tu pliais du papier ?

Gachepapier

Si on ne compte pas les avions en papier qu'on faisait à l'école, oui !

Stéphane

Outre ce que tu pliais avec tes filles, comment es-tu passé à des modèles plus complexes ?

Gachepapier

Les choses ont démarré doucement après ce premier livre. Les modèles étaient vraiment intéressants. Si mes souvenirs sont bons, ce devait être un livre de Robert Lang ou de John Montroll. Peut-être les deux ensemble. Mais ce livre en a amené un deuxième, puis un autre, et beaucoup trop ensuite. Au bout d'un moment, je me suis demandé si Internet pouvait me proposer autre chose. Je me suis vite inscrit sur le forum francophone d'origami. D'abord, j'observais sans rien dire. Ensuite, j'ai commencer à participer plus activement. Je dois en être à plus de deux milles messages depuis le temps.

Stéphane

Je n'ai pas fait le compte, mais c'est sûr que tu y es très occupé ! Ça a toujours été un endroit génial pour parler d'origami.

Gachepapier

Absolument. Et c'était surtout idéal pour rencontrer, virtuellement, des gens qui partageaient mon intérêt. J'ai beau aimer plier seul, je ne peux pas m'améliorer si je ne me confronte pas aux idées et aux critiques d'autres plieurs. C'était une vraie opportunité pour rencontrer mes semblables.

Stéphane

Très rapidement, tu as commencé à plier tes propres modèles. Comment as-tu commencé à les créer ?

Gachepapier

Bonne question  En fait, l'aspect créatif de l'origami me semblait réservé aux personnes qui écrivaient des livres. Je ne pensais pas que ça puisse me concerner. Et puis je me suis heurté à mes propres limites : les modèles les plus complexes qui m'intéressaient étaient justement trop complexes et trop difficiles à plier. À ce moment, j'avais presque perdu le goût du pliage. Puis, presque par hasard, j'ai eu la chance de visiter l'Origami House à Tokyo. Plusieurs modèles, en particulier d'éric Joisel et de Satoshi Kamiya, y étaient exposés. Ils m'ont époustouflé. Je me suis rendu compte qu'il y avait plus de choses que ce qu'on pouvait trouver dans les livres. Si quelqu'un pouvait réaliser d'aussi belles sculptures, je voulais en faire autant. Ce fut pour moi un second départ, qui dure toujours, dix ans après cette visite.

Stéphane

Un beau voyage ! Ça a dû te faire quelque chose de voir tous ces modèles en vrai...

Gachepapier

C'était fabuleux ! Le plus étonnant était de me rendre compte qu'on pouvait admirer ces pièces de tous les côtés. Elles étaient magnifiques quel que soit le point de vue. De véritables sculptures. C'était impensable pour moi. En repartant, je savais qu c'était une voie à explorer. Ne pas chercher la complexité pour elle-même, mais chercher à créer des objets à admirer. J'ai aussi eu la chance de rencontrer M. Satoshi Kamiya, dans la boutique de l'Origami House, mais je ne l'ai pas reconnu. En rentrant, quand j'ai raconté mon voyage sur le forum francophone, éric Joisel m'a tout expliqué : "Oh; tu as vraiment rencontré Satoshi Kamiya !" Et ainsi s'est déroulée ma rencontre avec un maître.

Stéphane

Dommage que tu ne lui aies pas demandé un autographe !

Gachepapier

Je ne savais absolument pas qui c'était ! On lui achetait simplement des livres !

Stéphane

Maintenant, tu crées tes propres modèles. Peux-tu nous expliquer comment une idée prend forme dans ton esprit, puis dans tes mains ?

Gachepapier

C'est très différent d'un modèle à l'autre. Parfois, tout vient d'une technique, parfois d'une expression, parfois d'une blague. Par exemple, si je commence à plier un masque, alors je vais me focaliser sur une expression plutôt que sur une base. Si je plie quelque chose de plus technique, comme ma tour de guet, tout est calculé d'avance et pré-plié. Et toutes les possibilités intermédiaires. Ce que je préfère, c'est d'avoir une idée qui demande un peu de technique, pour qu je puisse partir d'une base simple que je vais explorer sans avoir besoin de tout calculer à l'avance. La partie calcul a beau être intéressante d'un point de vue mathématique, ça finit vite par me lasser. J'aime la possibilité d'avoir assez d'expérience pour construire cette idée de départ, sans me charger avec les détails techniques, tout en ayant la liberté d'expérimenter les expressions que je peux apporter au modèle.

Stéphane

Quand je regarde tes modèles, je vois que tu utilises plusieurs techniques, comme le wetfolding ou le froissage. Comment un modèle te guide vers la meilleure technique à utiliser ?

Gachepapier

Ça ne fonctionne pas toujours comme ça. Dans ce cas, je range tout dans une boîte et y retourne quelque temps plus tard. Entre-temps, j'aurais appris autre chose ou serais capable d'y jeter un regard neuf.

Stéphane

Et quand considères-tu qu'un modèle est achevé ?

Gachepapier

Quand je suis sur le point de déchirer le papier ! Il faut souvent que je me force à arrêter. C'est toujours tentant de faire encore un pli. Parfois, je fais ce pli de trop, et je dois jeter ma feuille pour tout recommencer. Et m'arrêter plus tôt. Mais, en théorie, je dirais que quand je ne trouve pas d'autres détails à ajouter, c'est le moment d'arrêter. Ou quand j'ai trouvé une expression qui me surprend... Tout dépend du but que je me suis fixé. Et de temps en temps, je plie sans but, et s'il en ressort quelque chose, c'est génial ! À d'autres moments, j'ai une idée précise en tête et soit j'arrive à la mettre en forme, soit je trouve autre chose en chemin de suffisamment intéressant à creuser.

Stéphane

Quand tu commences un modèle, est-ce que tu t'attends à des retours, surtout si tu en mets des photos en ligne ?

Gachepapier

Oui, c'est l'idée d'avoir un blog et une présence en ligne. Malheureusement, les gens sont souvent très gentils -ce qui est bien sûr une bonne chose !- mais parfois, quand quelqu'un voit un détail qui le chiffonne, et qu'il pourrait vous aider, il ne dira rien par peur de vous froisser. Les retours qui font progresser sont difficiles à obtenir. En un sens, les louanges sont très courantes et nombreuses, et c'est leur nombre ou leur absence qui vous donne des informations indirectes. Mais un modèle ne devrait pas être jugé par un concours de popularité. Certains sujets plairont plus que d'autres, peu importe leur qualité de réalisation. Mais oui, je cherche vraiment des retours en mettant une photo en ligne. Plus personnellement, ça me permet de savoir, une semaine, un mois ou un an plus tard, si ce modèle me plaît encore. Comme mes créations sont plutôt volumineuses et qu'il y en a déjà plein la maison beaucoup finissent dans des boîtes. Je ne les ai pas constamment sous les yeux. donc si la photo me parle encore, un an ou deux après, alors oui, ce modèle a sûrement des qualités.

Stéphane

Donc ils vivent leur vie en ligne et tu y jettes un oeil de temps à autre...

Gachepapier

C'est ça. Et c'est aussi une archive. Si la maison brûle, Internet sera certainement toujours là.

Stéphane

Quel optimisme !

Gachepapier

N'est-ce pas !

Stéphane

Et comment choisis-tu ton papier, quand tu crées et plies un modèle ? Je suppose que tu ne prends pas le même papier pour un premier jet, mais comment arrêtes-tu ton choix sur celui dont tu as besoin ?

Gachepapier

La plupart du temps, c'est la technique qui décide. Par contre, quand tu me demandes si je prends un papier différent pour mes premiers essais, c'est plutôt le contraire. La plupart de mes créations qui me plaisent sont des premiers essais. C'est aussi pour ça qu'il y a beaucoup de modèles ratés dans ma corbeille. Mais, en effet, le choix se fait en fonction de la technique. Tu ne fais pas de wetfolding avec un papier que tu utiliserais pour du froissage ou un pliage très géométrique. Donc oui, le choix du papier est la première étape de chaque modèle que je vais plier. Et les seules fois où je vais plier un modèle à répétition, ce sera quand j'aurais besoin de l'enseigner ou de le diagrammer. Là, c'est un peu différent.

Stéphane

Puisqu'on parle de diagrammes, je sais que tu travailles sur un livre avec Dáša Ševerová…

Gachepapier

C'est juste.

Stéphane

Pourrais-tu m'en dire plus ?

Gachepapier

C'est un énorme projet. Ça semble irréalisable. Une telle charge de travail ! D'un autre côté, c'est fantastique de collaborer ainsi. Nous avions envie de publier un livre depuis plusieurs années déjà. Mais il y avait peu de chance que ça aboutisse, autant à cause la quantité de travail que de mon incapacité de dessiner seul de bons diagrammes. Mais après avoir vu le premier livre de Dáša, qui est sorti l'an dernier, j'ai été impressionné par sa façon de diagrammer. Nous nous sommes rencontrés à plusieurs conventions, nous en avons discuté et elle a accepté que nous collaborions sur un livre de mes créations. C'est énorme pour moi. Le plus intéressant est que ça m'amène à repenser mes modèles pour les lui rendre clairs à diagrammer. Nous avons des styles très différents, chacun peut s'en rendre compte. Mais c'est une bonne chose, parce qu'en consacrant autant de temps à décortiquer mes modèles, je me les approprie autrement et je comprends mieux ma façon de faire. Nous sommes très complémentaires. L'idée du livre, c'est de présenter certains de mes modèles, avec leurs techniques de pliage, que je considère plus comme du modelage que du pliage. C'est ce qui va devenir le titre du livre d'ailleurs, Shaping paper. Je veux aussi y expliquer comment je prépare mes feuilles, parce que ça joue énormément sur la qualité du rendu final. Et j'aimerais en faire un livre à laisser sur sa table basse, qu'on aime laisser à la vue plutôt que de le ranger sur une étagère.

Stéphane

Tu sais déjà quand il sortira ?

Gachepapier

Nous visons cette fin d'année. Je ne sais pas encore si nous y arriverons, mais nous travaillons d'arrache-pied. J'y consacre beaucoup de temps, Dáša aussi. Son style de diagrammage est extraordinaire mais à un prix. Ça lui prend énormément de temps. Nous sommes loin de diagrammer un modèle par semaine. C'est impossible. Nous avons tous les deux une famille à côté !

Stéphane

Je suis très intéressé par ce livre, je l'attends avec impatience !

Gachepapier

Merci, moi aussi !

Stéphane

J'espère qu'on l'aura pour Noël !

Gachepapier

Ce serait génial. Ça tomberait très bien. Et pour être honnête, ce serait le plus beau cadeau que je puisse me faire.

Stéphane

Je suis sûr que ce sera un très bon livre, qui rendra honneur à ton travail.

Gachepapier

On y travaille beaucoup. On travaille beaucoup à montrer les choses. Ce ne sera pas une série d'étapes à suivre, mais plutôt des mouvements à comprendre. C'est ce que j'ai appris de meilleurs plieurs. Un bon modèle, ce n'est pas juste quelque chose que tu vas reproduire en suivant un diagramme. C'est quelque chose que tu pourras améliorer, t'approprier. J'espère que ce livre transmettra tout ça.

Stéphane

J'en suis sûr. Et à voir les réactions sur internet, beaucoup attendent ce livre.

Gachepapier

N'en retenez pas votre souffle trop longtemps !

Stéphane

Puisqu'on parle d'Internet. Tu as évoqué ton blog. Tu avais l'habitude d'y poster des photos de tes travaux. Tu as migré vers Instagram. Qu'est-ce qui a motivé ce changement ?

Gachepapier

La simplicité. C'est tellement plus simple d'y créer un post que d'écrire un article sur Blogger, qui a changé ces dernières années. J'avais pourtant automatisé certaines choses, mais des paramètres ont changé et ça ne fonctionne plus aussi bien. Il faudrait que je reprenne tout ce travail de programmation... Et quand je vois qu'il me faut dix minutes pour créer un post sur Instagram, alors qu'il me fallait presqu'une heure pour rédiger un article sur Blogger... Un autre avantage d'Instagram, c'est sa communauté de plieurs, qui y est très active. Et ça, aucun blog ne peut vous l'apporter.

Stéphane

En 2012, tu as été invité à la convention de Lyon. était-ce la première fois que tu étais invité dans une convention ?

Gachepapier

Oui. Et c'était incroyable. J'ai pu rencontrer des créateurs dont j'étais le plus grand fan. Et ils étaient invités eux aussi ! Donc oui, c'était vraiment une convention extraordinaire, où j'ai pu rencontrer Stefan Weber, Quentin Trollip, Miyajima Noboru. Je les connaissais déjà virtuellement, ou grâce à leurs livres. Et l'équipe organisatrice en a fait une expérience fantastique. C'est d'ailleurs toujours le cas à Lyon. Et c'est ce qui me motive à y retourner, si je peux, tous les ans. C'est un rendez-vous que je conseille à tous les passionnés d'origami.

Stéphane

Qu'est ce qui te pousse à assister à des conventions, même sans y être invité ?

Gachepapier

Ça a changé avec le temps. Après avoir participé à de nombreuses conventions pendant plusieurs années, j'y retourne pour retrouver des amis. Les gens de l'origami constituent une foule intéressante et très éclectique. On rencontre des personnes qu'on ne peut croiser nulle part ailleurs. On a besoin de ce ciment. L'origami favorise la rencontre. J'y retourne aussi pour apprendre de nouveaux trucs. Même si je suis plutôt bon dans ma partie, il y a beaucoup de choses où je suis franchement mauvais. Si tu veux un exemple, je ne suis vraiment pas doué pour plier. Aller en convention va m'aider à m'améliorer et à apprendre à plier proprement. C'est vrai ! Aussi, quand tu veux apprendre une nouvelle technique, comme plier des tessellations ou te lancer dans le froissage, si tu veux savoir comment préparer ton papier ou présenter tes modèles pour les mettre en valeur, il n'y a rien de mieux qu'une convention.

Stéphane

Je suppose que tu conseillerais à tous les plieurs de se rendre à une convention, pour rencontrer d'autres personnes et s'améliorer ?

Gachepapier

Évidemment. Même si on peut progresser seul, rien ne remplace l'échange direct.

Stéphane

C'est vrai. C'est bien de se parler en ligne, mais c'est toujours mieux de se rencontrer en personne.

Gachepapier

Bien sûr. Et il y a autre chose, je m'en rends seulement compte. Peu importe l'étendue de ta présence en ligne, elle sera limitée par ta capacité à prendre de bonnes photos. Quelqu'un qui prend de belles photos d'un modèle moyen aura de meilleurs retours que celui qui prendra une mauvaise photo d'un beau modèle. Et c'est normal, la photo est la fenêtre que tu ouvres sur ton travail. Mais cette question ne se pose pas quand on se rencontre "en vrai". Dans ce cas, tu peux montrer tes modèles à tes interlocuteurs, ils peuvent les manipuler. Tu n'es plus limité par les contraintes du virtuel. Ça semble évident, mais ça fait une grosse différence.

Stéphane

Tu fais partie du monde de l'origami depuis une décennie. En quoi les gens, les techniques ont évoluées en dix ans ? Tu as vu des changements ?

Gachepapier

Oui. Pour la technique, l'évolution a été progressive. La plus grosse révolution, rendue possible par la compréhension de nouveaux outils mathématiques, a déjà vingt ou trente ans. Je suis loin d'être un historien de l'origami, mais pendant les dix ans pendant lesquels j'ai créé des modèles, les gens se sont améliorés, ont bénéficié d'une grande émulation. Mais ça avance doucement. Je n'ai pas constaté un brusque changement.Chacun s'est amélioré, progressivement. Pour ce qui est de l'origami, son univers a beaucoup changé. Sa visibilité, par exemple, s'est beaucoup améliorée. On voit de plus en plus d'origami, et pas uniquement dans la publicité ou l'illustration. On a pu voir de grandes expositions se monter, à New York, Taïwan, en Israël. Et il y a le musée de Saragosse, dont l'importance est capitale pour donner à voir de l'origami. Mais le changement s'est aussi fait à l'intérieur de l'origami. Il y a plus de femmes créatrices. En tout cas, on les voit mieux, peut-être qu'elles ont toujours été là. On en voit de plus en plus, et c'est une bonne chose. Elles vont nous montrer de choses plus intéressantes, bien loin de tous ces insectes, toutes ces araignées. Un autre point fort, ce fut la Convention pour les Créateurs. Elle a permis aux créateurs de se rencontrer et de chercher des idées pour améliorer leur art. Ce fut, à mon avis, un grand changement.

Stéphane

Penses-tu que ces changements vont perdurer ? Ce serait une bonne chose que l'origami gagne en visibilité et reconnaissance.

Gachepapier

Je ne suis pas devin, mais je l'espère. L'origami peut se développer sur plusieurs fronts. évidemment, il a un fort potentiel pour être reconnu comme discipline artistique, pour peu qu'on lui donne de la visibilité. Il a un rôle éducatif à jouer, aussi. Il pourrait être utilisé pour aider à la compréhension de certains concepts mathématiques, qui ne sont pas toujours transmis clairement aux élèves. Et d'autres personnes utilisent l'origami dans des domaines technologiques. Il y a aussi beaucoup de potentiel dans ces domaines.

Stéphane

Comment l'origami s'intègre à ta vie quotidienne ?

Gachepapier

Ça a un peu changé ces derniers mois, depuis que je travaille plus assidûment sur mon livre. Même si j'ai créé moins de modèles cette année, je ne suis pas moins impliqué, bien au contraire. Mais une grande partie de ce travail reste, de fait, invisible tant que le livre n'est pas sorti. Sinon, il y a des modèles partout dans la maison, ce qui constitue un sujet régulier de discussion. Pour ne pas dire de friction... J'essaie aussi de participer régulièrement à des conventions, ce qui prend aussi beaucoup de temps. Les voyages perturbent la vie de famille, mais comme j'en retire beaucoup de plaisir, j'essaie de conserver ce rythme.

Stéphane

Merci beaucoup Gachepapier, pour ton temps et ta présence. C'était un plaisir de t'accueillir, et j'espère que nous nous verrons bientôt, en personne cette fois !

Gachepapier

Le plaisir était partagé, merci beaucoup. J'espère que tes prochains invités seront intéressants, parce que pour cet épisode, je sais déjà ce que je vais dire ! C'était vraiment très bien, merci !

Stéphane

Cher auditeur, si vous voulez admirer le travail de Gachepapier, suivez-le sur Instagram, @gachepapier. Surveillez la sortie de son livre, écrit en collaboration avec Dáša Ševerová. Et intéressez-vous aux conventions qui peuvent se tenir près de chez vous : il pourrait y participer ou y être invité.

Et maintenant, il est temps de faire un tour dans la Grande Bibliothèque de l'Origami.

[TV dialogue]

[Steven Universe, S04E03]

Steven : BOOOKS !!!

Librarian : Sshh !

Steven : boooks…

Stéphane

Chaque mois, j'y ferai un tour pour savoir ce qui se passe dans le monde de l'origami.

Aujourd'hui, je vais vous parler d'un livre sorti en mai 2019, One Water One World, publié par Nicolas Terry. Il propose une sélection de modèles et de diagrammes du SAOC (Spring and Autumn Origami Club), un collectif d'artistes chinois. Vous connaissez certainement les ebooks qu'ils éditent chaque année, Chinese New Year Origami et Origami Record.

Dans ce livre, ils proposent des diagrammes d'animaux aquatiques, qu'ils vivent en rivières, lacs ou océans. Ily en a trente ici, des mammifères, des poissons, des arthropodes, etc.

Jetons un oeil à l'objet en question. C'est un livre relié épais et solide, imprimé en papier glacé.

En l'ouvrant, on remarque en premier lieu les photos des modèles. Il y en a deux ou trois par page. Elles sont très colorées et les modèles sont si bien pliés qu'elles rendent inutiles d'ajouter des photos des vrais animaux. On a déjà envie de prendre une feuille et de plier. Vous remarquerez que les fonds des photos s'assombrissent à mesure que les animaux représentés vivent plus profondément sous l'eau. C'est d'ailleurs ainsi que les modèles sont réparties dans le livre. Il y a trois parties, pour trois habitats : eau douce, mer peu profonde, mer profonde. Aucune indication sur la difficulté des modèles, mais on constate une progression à l'intérieur de chaque section.

Maintenant, allons voir les diagrammes. Ils commencent par quelques conseils pour bien choisir son papier. À chaque modèle on a trois ou quatre suggestions avec les dimensions adéquates. Plus petit pour les papiers les plus fins, plus grand pour les plus épais. On trouve aussi un crease-pattern et le ratio entre le carré de départ et le modèle terminé.

Les diagrammes sont clairs et précis. Les étapes sont agencées à l'occidentale, de gauche à droite et de haut en bas. Deux à quatre étapes par ligne, trois à quatre lignes par page, sans cheminement sinueux. Les deux faces du papier sont montrées, même pour les modèles sans changement de couleur. Autre détail appréciable, la façon de représenter les indications de pli le long d'une arête. Les traits sont légèrement décalés. Ce sont de très bon diagrammes, une invitation immédiate au pliage.

Je ne peux que vous conseiller de vous procurer ce livre, vous ne serez pas déçus. Il est certainement difficile pour des débutants, mais il mérite ces efforts.

Et si vous pouvez vous permettre d'acheter la version numérique en plus, n'hésitez pas. Vous aurez un fichier pdf d'excellente qualité qui vous permettra de zoomer avec précision sur les étapes les plus difficiles. Amusez-vous bien à plier ces étranges créatures.

Pour en savoir plus, allez sur origami-shop.com.

Il est temps de quitter la bibliothèque. Nous y reviendrons le mois prochain pour consulter un autre livre.

Vous avez certainement deviné que nous sommes ici pour parler d'origami de façon ludique. Alors j'aimerais vous montrer comment l'origami va conquérir le monde...

[TV dialogue]

[Dead like me, S02E04]

Ethan : So, I do origami. I really like craft so I had some extra time 'cause I work so quickly so I made you… I made you a swan.

Stéphane

Aujourd'hui, nous allons écouter de la musique. J'aimerais vous présenter le travail d'Alex Cordo, un guitariste français. Il a sorti son premier album, Origami, en 2016. Influencé par Steve Vai, Joe Satriani et des siècles de musique classique, on peut qualifier son style de hard rock progressif.

J'ai eu la chance de le rencontrer il y a deux ans. J'ai pu lui demander pourquoi il avait choisi "Origami" comme titre de disque. Il m'a expliqué qu'il avait du mal à trouver un titre et que son épouse lui a suggéré "Origami", parce qu'elle entendait sa musique comme un travail architectural complexe, construit avec énormément de précision, facile à appréhender de l'extérieur, mais fait de multiples épaisseurs complexes. Elle est bien tombée, non ? Allez vous faire votre avis sur alexcordo.com.

Cet épisode touche à sa fin. Mais je ne vous quitterai pas sans vous recommander d'autres podcasts à écouter avant le prochain épisode.

[TV dialogue]

[The Good Place, S03E06]

Michael : You want to listen to a podcast maybe ?

Stéphane

En voici deux, les premiers que j'ai écoutés et qui m'ont fait tomber dans le monde du podcast.

Le premier, c'est Alice isn't dead, une production américaine de Night Vale Presents, créée par Joseph Fink. C'est un voyage au coeur des états-Unis au cours duquel Keisha cherche sa femme disparue, Alice. Sa quête mettra sur sa route maintes horreurs, conspirations et mystères. Si vous appréciez les romans de Stephen King, vous allez adorer Alice isn't dead.

[Podcast]

[Alice isn't dead, S03E06]

Michael : You want to listen to a podcast maybe ?

Stéphane

Le deuxième est français et s'appelle Un épisode et j'arrête. Des journalistes spécialisés y parlent de séries télé. Chaque semaine, ils choisissent une série et un thème pour en débattre. Avec ses échanges passionnés et argumentés, il ne vous décevra pas.

[Podcast]

[Un épisode et j'arrête

Salut à tous et bienvenus dans ce nouvel épisode d'Un épisode et j'y arrête, le podcast consacré aux séries de l'Association Française des Critiques de Séries.

Stéphane

Cher auditeur, merci de votre attention.

Abonnez-vous à ce podcast sur Ausha, iTunes et partout où vous trouvez vos podcasts. Suivez-moi sur Twitter et Instagram, @PrecreasePod, et visitez mon site www.precreaseandcollapse.com. Vous y trouverez, entre autre, le texte en anglais de cet épisode, ainsi que sa traduction en français.

Vous pouvez me soutenir en me partageant sur vos réseaux habituels. N'hésitez pas à me recommander à vos partenaires en origami, groupes ou associations

Enregistré et monté par moi-même, Stéphane Gérard.

La musique est Slottskogen Disc Golf Club de Wintergatan. Allez les écouter sur BandCamp.

Le mois prochain, j'aurai le plaisir de recevoir une artiste française dont le travail montre une alchimie subtile entre formes et couleurs.

En attendant...…

Special guest

On va faire de l'origami !

[Theme]
 
Stéphane

Qu'est ce qui te convient le mieux, le precreasing ou le collapsing ?

Gachepapier

Je déteste préplier ! Je déteste ça ! C'est horrible ! Collapser, oui, je vous en supplie ! Et je m'en rend compte aussi sur mes propres modèles. Certains ont absolument besoin de prépliage, sinon c'est impossible de les plier correctement. Mais j'en souffre... Je souffre tant de toutes ces heures où je dois préplier.